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       Le moment était désormais venu pour toi de poursuivre ton chemin. Un chemin que tu parcourais depuis tant d'années déjà, vers un horizon incertain, poursuivant peut-être une chimère. C'est sur cette même route que nous nous sommes croisés. J'étais plongé dans l'obscurité, mais j'y trouvais alors un certain plaisir. Pendant un temps, tu m'avais saisi par la main. Tu avais enchaîné mon coeur avec tes sourires et ton regard d'ambre. Pendant un temps, seulement... Tu pensais être arrivée au bout du chemin, tu croyais avoir touché au but et pouvoir enfin poser tes valises. Tu t'étais trompée.

       C'est du moins ce que tu penses. Mais mon coeur hurle que tu as tort, et mon esprit est sur le point d'exploser à force de réflexion. Je suis entré dans ton univers, j'ai touché un astre si lumineux et si brûlant que je m'en suis brûlé les ailes. Et tu me précipites aujourd'hui au plus profond des ténèbres, brisé et prostré, sans plus m'accorder un seul regard. Aucune considération. Comme si rien de tout ça n'avait existé. Est-ce que ce n'était que le fruit de mon imagination? Un rêve qui a viré au cauchemar et dont je viens soudainement de me réveiller? Je ne mérite pas même le rôle de confident? D'ami? Où est passée cette jeune femme sensible, délicate et passionnée? Les questions affluent et se bousculent, mais les réponses ne viennent pas, et sans doute ne viendront-elles jamais.

       Insupportable. Après avoir partagé ton quotidien, goûté à tes gestes remplis de douceur et à tes lèvres de velours, il ne me reste plus guère que le néant, l'incompréhension et une rancoeur qui grandit de jour en jour. Si seulement celle-ci pouvait se métamorphoser, à la façon d'une chrysalide, pour devenir haine. Tout serait tellement plus simple. Mais seul demeure un sentiment d'abandon et de désespoir lorsque je constate que tout l'amour et toute l'affection que je te porte ne veulent pas s'éteindre. Malgré le fait que tu ne sois plus « Elle ». Malgré le fait que je ne sois plus que l'ombre de moi-même. Par ta faute. Tu es désolée d'être entrée dans ma vie? Moi je suis désolé que tu aies décidé d'en sortir.

       Tout ça au nom de quoi? D'un amour de jeunesse qui te hante? D'une sensation perdue que tu désespères de retrouver? Est-ce que ça vaut un tel sacrifice? Non, j'en doute. Tu courrais ta vie entière dans son sillage que tu ne l'atteindrais jamais. Mais « Il » est toujours présent. Tu lui permets de jouer avec toi et tes sentiments. Tu le laisses te poursuivre et te pourrir l'existence. Tu acceptes de saborder ce que tu as et ce qui est bon pour toi pour ce que tu n'as plus. Tu ne sais pas, et tu ne sauras jamais ce que c'est que d'aimer vraiment. Pleinement. Se donner entièrement l'un à l'autre sans attendre en retour un reflet de son propre égoïsme. C'est quelque chose qui s'apprend, qui se construit à deux. Rien n'est inné. Mais tu es restée une enfant. Tu es restée naïve, et ton esprit étriqué ne conçoit pas un monde en dehors du tien.

       Puisque tu préfères te borner à ta vision des choses, soit. Continue à te voiler la face, à fermer les yeux sur ce qui pourrait changer ta vie et sur ceux qui tiennent réellement à toi. C'est trop beau, trop immaculé pour toi. Tu sembles te complaire dans ta douleur et dans l'immobilisme. Dans ce cas, souffre, mais n'entraîne personne d'autre dans ta chute. Je ne le méritais pas. Je ne pense pas. Et ce qui me fait le plus mal, c'est d'avoir la conviction que tu n'auras jamais conscience de ce que tu perds. Ce soir, ma plume devient serpent et je crache mon venin. Tu as le droit de me haïr pour ça. Au moins, je comprendrai pourquoi tu as installé ce silence et cette distance entre nous. Mais ne va pas croire que je me sens mieux pour autant. Mes cris reflètent mon désarroi et mon inquiétude. Peu importe ce qu'il peut advenir de moi, prends seulement soin de toi.

       Je ne te renie pas. Je t'espère en vain. Si un jour, la jeune fille que j'ai rencontré sur ce banc devait réapparaître, je t'en prie : dis-lui que je me languis d'elle.

       Je t'aime...